Par Raphael Enthoven
INTRODUCTION
Nous savons tous que nous allons mourir. Cette certitude-là nous définit comme humains, aussi surement que la conscience de soi, ou la capacité de changer d'avis. C'est moins la mort en elle-même qui est lourde, que l'idée de la mort. Car il n'y a pas d'expérience de la mort comme telle: comme le démontre Épicure, tant que nous vivons, la mort n'est pas là, et la mort n'est là que si nous ne sommes plus. D'aussi loin qu'un vivant revienne, il ne reviendra jamais d'entre les morts. Est-ce à dire qu'il est toujours trop tôt, ou trop tard, pour parler de la mort ? Mais à défaut de parler de la mort elle-même, noua avons les moyens et le devoir de réfléchir sur notre condition d'êtres mortels. En effet, quel sens donner à la certitude de notre mort ? à une existence qui se résume à vivre pour mourir ? La mort ne frappe-t-elle pas d'absurdité le moindre de nos actes ? Quelle espèce de morale prend en compte l'éminence et l'imminence de notre trépas ? Pourquoi bien agir si nous ne sommes que des morts en sursis ? Pourquoi vivre, alors que nous allons mourir ? La mort emprunte le visage que la vie donne à nos angoisses, car on peut affirmer que toutes nos angoisses se résument à celle-là. Comment supporter la finitude de notre existence de mortel ? Comment ne pas se désoler d'avoir à mourir un jour ?
Faut-il s'évertuer par tous les moyens, à oublier que nous allons mourir, ou, à l'inverse, réhabiliter l'inquiétude devant la mort ? Comment ne pas désespérer d'une vie que la mort rend désespérante ? Il semble que confrontés à la certiutde décourageante de notre mort, nous puissions réagir, grosso modo, de deux façons antinomiques : soit la mort n'est pas tenue pour un terme, mais pour le commencement d'une vie éternelle dont la « réussite » dépendrait de notre comportement ici-bas (En cela, toute théologie, voire toute métaphysique n'a-t-elle pas pour but de nous soustraire à l'idée de la mort, ou de nous affranchir de l'absurdité d'une vie qui ne tend que vers son terme ?), soit la mort est un terme radical, et alors nombreux sont ceux qui, arguant du fait qu'on ne vive qu'une fois, déclarent qu'il nous faut profiter de chaque instant comme s'il était le dernier, c'est le sens du « Carpe diem » épicurien. Quelle vie, en somme, déduire de la certitude d'avoir à mourir un jour ? Telle est la question qui résume toutes les autres, ou le meilleur objet que la philosophie puisse se donner. EXEMPLES DE SUJETS
- La pensée de la mort a-t-elle un objet ?
- La mort ajoute-t-elle de la valeur à la vie ?
- Pourquoi vivre, alors que nous allons mourir ?
- Qu'est-ce qu'une raison de vivre ?
- En quoi le culte des morts est-il signe d'humanité ?
- Mourir pour une cause plaide-t-il en faveur de cette cause ? BIBLIOGRAPHIE CONSEILLÉE
Baudelaire :
- Les Fleurs du Mal (notamment les poèmes intitulés « Une Charogne », « Le Voyage », et « La mort des pauvres »)Bichat :
- Recherches physiologiques sur la vie et la mort. Première Partie, art. 10. De la différence entre mort naturelle et mort accidentelle)Camus :
- Le Mythe de Sisyphe. (Sur l'absurde qui est le fond de notre existence. Pourquoi ne pas se suicider, alors que nous n'avons aucune raison de vivre ? )F. Dastur :
- La Mort. Essai sur la Finitude. (Coll. Optiques philosophie)Épicure :
- Lettre à Ménécée, in Diogène Laerce, Vie des philosophes illustres..Heidegger :
- Essais et Conférences. « Bâtir, habiter, penser », p 177-178. . Ionesco :
- Le Roi se meurt.Jankélévitch :
- La Mort.Montaigne :
- Essais, I, § 20 : « Que philosopher, c'est apprendre à mourir. »Platon :
- Phédon (démonstration de l'immortalité de l'âme, récit de la mort de Socrate)Spinoza :
- Éthique, IV, 67. « L'homme libre ne pense à rien moins qu'à la mort, et sa sagesse est une méditation non de la mort, mais de la vie. »Tolstoï :
La mort d'Ivan Illitch